More is more...
Après un court (trop!) séjour aux Antilles, plus exactement en Rép' Dom' comme disent les branchouilles, c'est avec une extrème aversion que j'ai remis les pieds sur ma terre natale(même pô vrai, mais bon...). Une fois arrivée sur le tarmac et avoir déhambulé dans les rues de Paris en attendant mon train par 4°C, je fûs submergée par les émotions, sans doute une curieuse affection dû au probable retour dans le froid et la pluie, ou bien un immense choc thermique lié à la modique variable (26°C en différentiel, c'est pas grand-chose?) de température des lieux qui m'ont accueilli à mon retour...
En gros, je ne voulais pas être là.
Certes, j'étais contente de retrouver mes petits bouts de cul, de leur bisouiller le cou, là, juste sous l'oreille, là ou c'est le plus doux et le plus chaud, et où je me niche souvent quand je veux les sentir, dans tous les sens du terme. Mais j'aurais surtout, si on faisait fi des contraintes professionnelles et des multiples crédits qui nous tiennent en pur matérialiste, voulu rapatrier tout le monde sur place!
Allez, Go, on bazarde tout, on vend tout ce qu'on a et on se casse au soleil!!! Heu, bon, ça, d'accord, c'est être un tantinet idéaliste et rêveuse, je l'accorde, hein? Quand on se sert un peu de ses neurones, on prend conscience qu'entre vacances et réalité, il y a une marge, mais je suis comme ça, môa, j'adore les coups de sang, les rêves éphémères d'une heure, d'un jour, et plus encore que leur réalisation, c'est la dose fantasmagorique que je place dessus qui m'importe.
Mais quand même...
J'ai passé en revue notre bonne vieille société, culte du less is more, avec épuration totale à tout niveau... Ou chaque gramme pris chez une femme engendre un véritable drame, ou les récoltes professionnelles s'amenuisent comme peau de chagrin, ou les perspectives d'avenir, si elles ne sont pas plus roses là bas sont tout de même plus ensoleillées, et çà, croyez moi, ça compte...
J'ai vu des gens danser en arrivant au travail, danser pendant le travail, du barman au cuistot, en passant par les vigiles, les vieilles femmes, les bouts de choux tenant à peine sur leur deux pattes.
J'ai vu des gens s'asseoir à l'ombre quand la chaleur devient trop tenace, discuter, rire, se partager l'eau en riant au éclat, s'envoyer des mots d'amour et se faire la cour...
J'ai vu des femmes, très rondes, très fines, très grandes, très petites se déhancher en vêtements légers sur un air de Merengué ou de salsa ou tout autre musique, seule la note compte. Je les ai vu se parer de paillettes sur leurs sacs, leur ceinture, leurs paupières, leurs chaussures, leurs lèvres...
Je les ai vu aussi se regrouper pour s'amuser, danser, faire la fête dans des lieux pleins à craquer dans une ambiance survoltée ou la chaleur rendait les peaux moites et les corps brillants, ou les mains se croisaient, s'entrelaçaient sans distinction, ou le passage dans une foule intense se fait à la torpeur d'un geste langoureux et délicat, ou l'homme est à sa place d'homme et la femme magnifiée dans son rôle de femme, avec tous les artifices que l'on ne tolère plus en france sous peine d'être taxée de vulgaire.
Elles, elles ne le sont jamais, vulgaires, les femmes dominicaines, elles sont sensuelles, provocantes, elles jouent le jeu de la séduction auquel les hommes s'adonnent avec passion. Elles resplendissent d'un aura que nous avons enfoui ici, qui ne ressort plus comme si nos femmes en France étaient devenues de jolis gravures de mode sur papier glacé... Pas un kilo de trop, pas une paillette en trop, pas un sourire de trop, pas une couleur en trop, pas...
Elles parlent aussi avec force et éclatent d'un rire sonore, elles sourient sans effort, elles vivent...
Pourquoi je vous dis ça et pourquoi j'ai mis cette photo de mes ongles fraichement manucurés sur le sable de la plage, fait par une Dominicaine dont c'est le travail, venir guetter le touriste en mal de bien-être et d'attention que nous sommes?...
Parce que cette couleur et ces petits dessins résument mieux que tous les mots l'intense différence d'état d'esprit de nos deux familles...
Lorsque cette esthéticienne aux couleurs d'ailleurs en est arrivée à me proposer le choix de la couleur de mes ongles, je lui ai posé la question: "Qu'est ce que vous mettez d'habitude?"
La réponse ne s'est pas fait attendre... "Les femmes françaises font ça d'habitude" et elles me sort le kit de french manucure... "Elles veulent discret..."
Toute interpellée à la cause que j'étais, je lui ai donc demandé ce qu'elle se mettrait pour elle, voyant bien que ses ongles longs et peints n'avaient rien à voir avec la French manucure.
C'est là, qu'elle m'a sorti avec un sourire des plus chaleureux qui soit un pot de rouge, de blanc et d'or.
"Si vous me laissez faire, je vous montre le soleil" qu'elle me dit, la dame.
Je n'ai pas fait 8000 km pour me transformer en Française aseptisée! Et moi, j'adore ça la couleur! J'embarque donc sur les codes locaux...
Et j'ai gardé le soleil sur mes ongles jusqu'à mon retour sur la sainte terre.
Et la première chose dont j'ai du me débarrasser à mon retour pour reprendre le travail fût mon soleil sur les ongles... Je les ai porté avec bonheur pendant plus d'une semaine, comme mes 3 kilos de pris sans aucun complexe, mais dès mon retour, il me fallait m'en débarrasser de toute urgence... des deux...
Evidemment, j'ai conscience que la vie n'est pas toujours drôle chez eux, ni pour eux, qu'il est difficile de trouver du travail, que la prostitution et le SIDA font des ravages parmi les filles et les garçons, que gagner sa vie demande un dur labeur, qu'ils n'ont pas les conditions dont nous bénéficions en France, ceci n'est pas une critique éplorée du système, ceci est un instant de faicheur qui nous ramène aux fondamentaux... le plaisir de vivre, et surtout la chaleur... Et je suis intimement convaincu que l'on a pas besoin de 30°C pour être chaleureux...
Et ça, ça change la vie...
L'année prochaine : CUBA!!